Le blog
Après avoir écrit un article sur le voyage lent, je me suis retrouvée traversant la Bolivie comme une vraie touriste en furie en 3 semaines, face à mes contradictions de "voyageuse écolo". Et ça m'a fait réfléchir. Et je n'ai plus envie de faire l'apologie du voyage, en tout cas pas sans réflexion. Alors il est temps d'être honnête, et de te montrer les trucs qui me dérangent dans le monde du voyage.
Oui, le voyage, c’est génial mais…
Voyager, c’est un incroyable : on se met à l’épreuve, on apprend, on découvre, on rencontre, on s’éveille. On vit plein de trucs intenses et c’est la garantie d’un Instagram générateur de jalousie #lifegoal !
Même si je suis convaincue que partir seule en Amérique Latine était la meilleure décision de ma vie, même si j’ai déjà envie de repartir avant même d’être rentrée, je n’ai plus envie de montrer des photos de jolis endroits en disant « Vas-y, c’est chouette et ça fera de toi un aventurier de renom avec une vie trop intéressante ! ».
Parce que dans ce monde merveilleux à l’hygiène aléatoire et aux styles vestimentaires douteux qu’est le backpack, il n’y a pas que du féérique.
Il y a aussi :
Des conséquences sur la planète
Aujourd’hui, on remet en question notre façon de consommer et notre mode de vie occidental sur tous les plans, mais pas trop celui de notre conception du voyage. Alors oui, bien sûr il y a le tourisme solidaire qui se développe (sans parler des problématiques du white savering). Mais on cherche à partir toujours plus loin pour faire le plus de choses, pour le moins cher possible.
Si tous les pays avaient la même facilité que nous de voyager, et prenaient l’avion autant que nous, les conséquences écologiques seraient catastrophiques. Mais nous serions bien malotrus de vouloir empêcher les pays émergents de voyager avec autant de facilité que nous depuis des années. Il serait donc peut-être temps de revoir nos façons de voyager.
Quelques pistes de réflexion : ici et là ! (mais je culpabilise quand même toujours d’avoir pris l’avion.)
Une bonne part d’égoïsme
Backpackers, nous nous targuons bien souvent d’avoir l’esprit ouvert, et de faire des choses « incroyables, d’être confrontés à une vie plus dure, et de voir la vraie vie gnagnagna ». Mais malgré toutes ces belles aventures, le voyage reste quelque chose d’égoïste.
Je suis partie sous couvert d’ambitions de découvertes et d’écologie, mais j’ai bien été obligée de m’avouer que c’est surtout moi que ça a enrichi. Et ce n’est pas grave, c’est juste comme ça. Mais je trouve ça important d’en avoir conscience pour garder les pieds sur terre.
Il faut simplement être capable de reconnaître que c’est bien souvent plus enrichissant pour nous de découvrir le monde, que pour le monde de nous découvrir.
Ces personnes qui « Font des pays »
« J’ai fait le Guatemala et le Pérou. Je vais faire le Chili. »
Peut-être que ça n’incombe que moi, mais que voilà une expression horripilante ! Expression que d’ailleurs on utilise beaucoup moins pour les pays occidentaux (me semble-t-il). On ne dit pas souvent « je vais faire le Canada ou l’Allemagne », on y « va » tout simplement. Donc pourquoi parle-t-on des pays du sud comme si on allait à la guerre ??
Il existe plein d’autres mots vachement mieux et qui ne transforment pas le monde en une pauvre Todolist à cocher pour impressionner en soirée.
Arrêtons de faire des pays, contentons-nous d’y aller, c’est déjà bien assez.
Le paradoxe de la sortie des sentiers battus
Sortir des sentiers battus, éviter les touristes à tout prix. Paradoxal quand nous sommes nous même touriste. Voilà qui me met dans l’inconfort, puisque je suis moi aussi bien souvent à l’affût de ce genre d’expériences.
À force de vouloir de chercher l’inédit, d’aller explorer l’inexploré, on sort tous ces lieux du secret au risque de les dénaturer et de voir la culture se transformer en folklore pour touriste.
Comme les femmes à Cusco, qui se promènent en tenues traditionnelles avec des lamas seulement pour faire payer des photos. Comme les complexes touristiques qui poussent comme des champignons dans la belle vallée du parc de Torotoro en Bolivie. Comme les Rainbow Mountains, au Pérou, « nouvelle excursion » dont les sentiers sont déjà surchargés de touristes, si bien que la faune sauvage ne peut plus vivre sur cette zone de la montagne.
Ces personnes qui veulent toujours tout moins cher
Les pays plus pauvres ont cet avantage d’être moins chers et c’est vrai que ça leur fait un bel atout voyage pour nous occidentaux ! Et il est vrai aussi que, trahis par notre blanche peau, les prix nous sont souvent gonflés et que donc négocier fait parti du game.
Mais il faudrait aussi garder à l’esprit ce que signifie vivre dans un pays pauvre, et les difficultés que rencontrent les populations. Même si les prix sont parfois légèrement gonflés, ça reste bien souvent moins cher qu’en France. C’est pour cette raison que je trouve cela extrêmement agaçant de voir des touristes tenter de tirer les prix vers le bas à outrance
Oui, on peut négocier, mais jusqu’à un prix qui nous paraît juste, que nous sommes prêt à payer, plutôt que viser le prix des locaux. Surtout quand il s’agit d’artisanat, avec des produits qui demandent énormément de temps, de minuties et de savoir faire. Voilà qui me paraîtrait plus logique pour les voyageurs au grandes idéologies que nous sommes.
Le voyage prétentieux
Ultime chose agaçante chez les backapckers, et que j’ai peur de faire aussi en rentrant : discréditer la vie des autres qui optent pour une vie plus « traditionnelle ». Backpackers, sous nos airs d’aventuriers à l’esprit libre et ouvert, nous ne sommes en rien plus louables ou incroyables que les autres.
Je sais d’avance que mon retour va être difficile et que la réintégration va être douloureuse après 9 mois seule.
Mais est-ce une raison pour discréditer la vie des autres comme beaucoup le font ?
Voyager, rentrer au bled faire de l’argent pour revoyager, est-ce vraiment plus constructif et plus glorieux que travailler, investir et faire des enfants… ?
Voilà pourquoi, je ne veux plus écrire d’article sur les villes ou les lieux que je visite. Je préfère réfléchir à comment et pourquoi voyager que de te faire des listes vides de sens de choses à faire A B S O L U M E N T.
Et comme j’ai peur de cumuler toutes ces choses agaçantes, si quelqu’un m’entends dire que j’ai « fait le Mexique », surtout qu’il ne se prive pas pour me mettre une tape derrière la tête !
Auteur.e : Laura
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