Le blog
Voilà près de 2 mois que tous les mardis, je prends mes bocaux et mes sacs en tissu pour partir Au Poids Chiche.
Là-bas, tout est vendu en vrac. La plupart des produits sont bio et/ou locaux. Les prix sont abordables. Et les biscuits au citron sont beaucoup trop bons.
Tout ça se trouve dans un petit camion qui traverse les routes du pays d’Aix toute la semaine avec Lauriane à son volant !
Lauriane, c’est la créatrice de Au Poids Chiche. Comme je voulais en savoir un peu plus sur ce petit camion et qu’il y avait du maté glacé à boire, j’ai pris le temps de lui poser quelques questions sur son épicerie roulante et sur ses débuts d’entrepreneuse !
Salut Lauriane ! Que faisais-tu avant de lancer ton camion ?
Avant d’être gérante de « Au Poids Chiche » j‘ai démarré ma vie professionnelle dans l’humanitaire pour La Croix rouge sur Paris, en Afrique puis dans l’Océan Indien.
Après ça, je suis redescendue dans le sud de la France (je suis originaire du Vaucluse) où j’ai travaillé dans l’insertion professionnelle pendant 5 ans. C’est à cette période que j’ai eu mes deux enfants.
Qu’est ce qui t’as motivée à te lancer dans l’aventure ?
C’est avant tout une démarche personnelle et familiale de s’être lancé dans le zéro déchet. C’est aussi le résultat de nombreux questionnements que je me suis posés pendant mon congé parental. À ce moment là, on a commencé à vouloir changer nos habitudes. On a cherché où acheter en vrac et je me suis rendue compte que sur le Pays d’Aix, il n’y avait pas grand chose.
Le magasin itinérant, c’est surtout un support pour faire mon petit colibri et apporter ma pierre à l’édifice.
Peux-tu nous présenter en quelques mots ton épicerie ?
Au Poids Chiche, c’est une épicerie itinérante, ou un camion magasin, qui parcourt les routes, les marchés, les lieux de vie, les entreprises du Pays d’Aix pour proposer des produits bio et locaux sans emballages jetables.
L’épicerie a été créée il y a 6 mois. Le premier choix était de s’orienter essentiellement vers des produits locaux (produits ou transformés dans la région), pour favoriser l’agriculture locale. Petit à petit, j’ai dû adapter mon offre, toujours en respectant les principes des produits raisonnés et responsables.
Je commence à connaître tes produits, mais je pense que je n’ai pas tout vu. Qu’est-ce tu vends dans ton camion ?
J’ai commencé avec des produits assez basiques pour la cuisine et la vie quotidienne. Tout est produit ou transformé le plus localement possible et/ou issu d’une production raisonnée et éthique.
Les produits changent régulièrement en fonction de la demande et des saisons. Par exemple, avec l’arrivée des beaux jours, on a commencé à proposer des jus de fruits et des graines (de courge, de lin …). Aujourd’hui, j’ai à peu près 200 références.
On choisit du local dans la mesure du possible, sinon on favorise le français et ensuite on va sur du bio équitable.
Ça permet tout de même de créer la passerelle entre le local et le consommateur.
Est-il facile de trouver des producteurs locaux ? et comment accueillent-ils ton idée ?
Le concept reçoit généralement un très bon accueil de la part des producteurs, je n’ai encore jamais eu de refus.
Comment je les trouve ? ça c’est fait l’année dernière au Salon de l’Agriculture par exemple. Et avec du bouche à oreille, des contacts, des rencontres sur les marchés.
J’ai été accompagnée pour être mise en lien avec certains producteurs. Ils sont souvent déjà dans une démarche d’agriculture raisonnée et vendent dans des AMAP ou assimilés, donc ils sont très réceptifs à l’idée.
J’essaye de choisir des producteurs qui fonctionnent en circuits courts, parce que ça fait vraiment partie du cœur du projet avec le « sans emballage ».
Comment les gens accueillent-ils ta démarche ?
Les gens qui font la démarche de venir sont souvent sensibles à ces problématiques. Certains viennent régulièrement pour faire leurs vraies courses, d’autres parce que ça leur rappelle des souvenirs d’enfance et de vacances. Il y aussi de nombreux petits achats, pour grignoter.
Ma meilleure surprise a été l’accueil des étudiants, à la cité U de Cuques. Le vrac leur permet d’acheter en petite quantité et des produits auxquels ils n’ont pas accès normalement. Et ils sont plutôt réceptifs à la démarche. On est sur un public jeune. On est sur l’avenir, donc c’est vraiment quelque chose qui m’a motivée !
C’est vrai que ça bouscule un peu les choses et ça peut faire réfléchir les gens. Parfois certains oublient de prendre leurs boîtes mais ce n’est pas grave, l’essentiel, c’est qu’il y ait une prise de conscience.
Respecter ces principes dans nos achats n’est pas toujours évident, ça demande de la recherche et de la réflexion, et c’est pour ça que j’essaye de centraliser tout ça dans mon camion !
Comment as-tu eu cette idée ?
En farfouillant, je suis tombée sur le réseau Zero Waste France qui m’a mise en lien avec des entrepreneurs sur le Pays d’Aix. J’ai notamment découvert l’épicerie Autrement Vrac à Salon de Provence.
Je suis tombée sur un projet de commerce itinérant en Dordogne qui m’a interpellée. Depuis, ça a continuer de turbiner dans ma tête, alors je suis allée faire une immersion au Bar à Vrac, à Marseille en mars 2016. C’est à ce moment là que je me suis dit que c’était ça que je voulais faire ! À partir de ce moment, j’ai mis à peu près 6 mois pour lancer mon projet.
Comment ça s’est passé ?
J’ai intégré le starter d’Inter Made, un incubateur spécialisé dans l’économie sociale et solidaire qui m’a aidée à structurer mon projet.
Puis je me suis lancée et j’ai trouvé le camion fin août 2016 !
À ce moment là, j’étais suivie par la plateforme pays d’Aix Initiative qui suit les entreprises pendant les 3 premières années de leur activité. Ils m’ont aussi accordé un prêt pour le démarrage de l’activité.
On a pu acheter les bacs et les silos (tous fabriqués à Lyon) grâce à la campagne de financement participatif sur Provence Booster qui a très très bien marché !
Grâce aux talents de bricoleur de mon mari, on a réaménagé le camion en fonction des dimensions des bacs et silos. C’était important de vraiment travailler l’organisation et l’esthétique du camion pour casser les à priori du vrac.
Le projet c’est donc monté très rapidement, j’ai eu mon idée en mars 2016 et ouvert le camion le 24 novembre.
Et maintenant tu en es où ?
Je ne gagne pas encore ma vie avec. Il faut en moyenne 2 ans pour pouvoir vivre de son activité, donc c’est quelque chose qu’on prend en compte à la création. Mais ça progresse tous les mois et ça, c’est vraiment positif.
Maintenant, le challenge c’est de fidéliser les gens et qu’ils en parlent autour d’eux pour que d’autres viennent.
Qu’est ce qui a changé dans ta vie quotidienne ?
Dans le camion, je suis toute seule, mais derrière c’est impossible d’être tout seul. Je suis fière de mon camion et de ce que mon mari a fait puisqu’il a beaucoup participé à l’aménagement. Ce qui est plus difficile, c’est le rythme avant et après le démarrage. C’est très fatigant, mais j’adore c’est vraiment super !
C’est aussi un projet de famille. J’ai deux petits de 3 et 6 ans, je ne les vois pas beaucoup, donc il faut qu’ils comprennent pourquoi je fais ça. Comme on était déjà dans une démarche familiale du zéro déchet, c’est plutôt facile de leur expliquer.
En commençant en novembre, j’ai dû travailler en chaussures de ski. Si un jour on m’avait dit ça, je ne l’aurais pas cru !
Je découvre aussi la spécificité du commerce l’itinérant. La fatigue physique est différente d’avant et le camion me prend énormément de temps. Mais je suis bien plus épanouie, parce que j’ai l’impression que je concours à quelque chose qui peut un peu changer la donne !
Considères-tu ton épicerie comme une façon de s’engager pour le monde de demain ?
Le projet c’est aussi de restaurer la confiance et le lien. C’est de savoir que ce que tu vas manger, il y a 14 salariés qui l’ont préparé pas loin de chez toi. Je connais les produits que je vends. J’ai vu comment il étaient transformées, chauffés sur place, coupés à la main… j’ai vu tout le processus. Et le concept du coup c’est de pouvoir dire qui est derrière ce biscuit ou cette confiture.
Il y a une bonne dynamique du zéro déchet. J’ai un mail par jour de personne qui voudrait que je lui raconte mon expérience. Tout cela est vraiment encourageant.
Qu’est ce qui te plait le plus ?
C’est l’aspect contact, conseil, échange… J’ai rencontré des gens supers. Le réseau se créé facilement, pour trouver de nouveaux emplacements, rencontrer de nouveaux producteurs… Et au-delà de la démarche du zéro déchet, d’une alimentation plus saine, plus locale, c’est aussi pour ça que j’avais envie de me lancer dans ce projet : pour le contact humain. À ce niveau là, je suis servie !
Et je vois bien en face que c’est partagé ! Les personnes viennent avec le sourire, laissent des commentaires positifs. Le projet c’est aussi de créer du lien, plutôt que de commander ses courses tout seul derrière son ordinateur.
Des conseils pour ceux qui veulent entreprendre ?
Pour ceux qui ont envie de se lancer, il ne faut pas hésiter mais sans être trop angélique, ni trop candide. C’est passionnant, mais ce n’est pas facile.
Et il faut savoir bien s’entourer ! Le plus important, je pense, c’est d’avoir son idée bien préparée, du soutien de sa famille, ses amis …
Aujourd’hui, il y a un réseau d’entrepreneurs qui s’est formé et qui s’appelle le RéseauVrac. Ce réseau est bien en phase de démarrage et il est très intéressant pour tout ce qui touche à la veille juridique et aux normes d’hygiène.
Et il faut avoir les pieds sur terre, sans se laisser décontenancer par les partenaires, notamment financiers. Surtout si on croit vraiment à son idée 🙂
Un dernier mot ?
C’est une belle aventure qui a démarré il y a 6 mois.
Encore plus de rencontres. Encore plus de bocaux à remplir. Encore plus de bouteilles à recharger et plus de conseils à échanger dans le pays d’Aix !
Donc tu sais ce qu’il te reste à faire !
Les spots d’arrêt et les produits changent régulièrement, donc ça ne sert rien que je te laisse le flyer ici. Pour savoir où retrouver Lauriane et son épicerie itinérante, je t’encourage à aller voir sur ici, sur sa page Facebook !
Auteur.e : Laura
Bravo Laurianne. Bon courage. Dommage que je n’habite pas dans ta région ! Bonne continuation . Bonne fête de Noël. Je t’embrasse.
Françoise Aurard-Belair